INTO THE BLUE
acylic on canvas, 2017
Exploring the streets of many cities such as Amsterdam, Lisbon, Boston, Montreal... they are in somehow my inner journeys of initiation. Enriched by centuries of commercial exchanges, these cities, veritable floating worlds on the water's edge, have developed an architectural and social urbanism in the manner of a living organism weaving its vital networks, metamorphosing over time into sprawling topographies.
acylic on canvas, 2017
Exploring the streets of many cities such as Amsterdam, Lisbon, Boston, Montreal... they are in somehow my inner journeys of initiation. Enriched by centuries of commercial exchanges, these cities, veritable floating worlds on the water's edge, have developed an architectural and social urbanism in the manner of a living organism weaving its vital networks, metamorphosing over time into sprawling topographies.
Solo Exhibition "Into the Blue" at Julia Gallery, Taipei, Taiwan, 2023
Exhibition "Entre (Fil)les" at Wagner Gallery, Paris, France, 2022
Marc-Williams DEBONO
AU-DELÀ DU BLEU
Longpont, le 27 Septembre 2023
Pénétrer dans le bleu intense que nous offre CHEN Mei-Tsen, c’est partir à l’aventure, parcourir un carnet de voyages chargé de souvenirs riches en émotion, encrés, topographiés, chéris et lézardés. On est pris dans la toile, le paradoxe de l’errance et de l’inscription dans un territoire. On suit les empreintes, cartes, réseaux, tumultes, sinuosités à foison qui construisent l’identité première. On se prend à épouser les formes, déployer l’architectonique racinaire jusqu’à un point de rupture qui prend aux tripes tout en ouvrant des horizons. Car la trace est là, tenace, rhizomique, qui invite à pénétrer chaque interstice, à parcourir artères, futaies, synapses, mondes flottants, smart cities comme urbanités reculées. Des kilomètres d’inspirations confluentes qui nous portent au sein de l’œuvre, dans son historicité : Taipei chaque fois revisitée...
Ici bouillonnent des architectures nouvelles et un retour aux sources qui font la genèse de ces monochromes bleus parsemés d’hydres tentaculaires. Là, émergent des vues aériennes de routes, pays, mers et ilots de terre dont la vue rapprochée conduit aux parcours incessants d’une foule indiscernable à travers les rues, ruelles et rus de ces cités et paysages. Autant d’espaces topologiques tissés fil après fil, qui loin de se concaténer à l’image de poupées russes, s’interconnectent en permanence et s’ouvrent au monde.
Or, c’est de Gaia qu’il s’agit, d’une terre vivante qui respire et grouille de créatures indissociables de leur tissu-mère. L’œuvre y pénètre, épouse chaque contour, se mue tantôt en Gorgone, tantôt en hôte permanente de la nature. Rapport mésologique au monde qui invite à repenser les liens intimes entre l’être et le milieu, le minéral et le végétal, l’homme et son habitat. Laisser transparaître l’histoire, l’amour et les sentiments au travers de ponts écouménaux : tel est le pari de l’artiste voguant des plants architecturaux de sa maison natale à la dense végétation des forêts urbaines.
Où nous conduisent ces flux et reflux lancinants ? A l’exil ou à la cohésion ? A l’unité ou à la dissémination ? La réponse de Mei-Tsen est un entrelacs de Je parsemé d’invites à cartographier, à inscrire le nomadisme, le matériau dans le vivant. Elle explose les bleus comme autant d’affects qui se croisent et se décroisent, de certitudes des sources entourées de volutes blancs matérialisant les trajets infinis de ses divagations. Les villes se succèdent et s’emboîtent les unes dans les autres. Les cultures se dévoilent. Les géographies se replient – trouées dans le ciel – prenant sens, comme survolées par St Exupéry. Chassé-croisé entre altérité et identité qui l’amène à passer du vécu à l’à-venir, du grand-angle à la fine ramure qui strie les papillons. Toute pensée y devient éphémère. Tout ancrage, vain. On a plus qu’à s’abandonner à ce vide-plein.
Cette imprégnation infuse tout au long du récit et ne peut que nous atteindre, tant on ressent le cœur battant de la cité, l’évanescence des nuages, ses poussées ventrales : souvenirs enfouis débordant tout l’espace, aléas des errances, atmosphère du Lieu...
Des blueprints à Paradise s’entremêlent ainsi les arborescences qui font l’œuvre. Le réseau est tissé. On s’y enracine, on s’y démène, on s’y noie. Luxuriance végétale fusionnant avec les artères de la cité, déclinaison de bleus d’outremer parsemée d’éclairs métaphoriques, dédale de ramifications neurales aux couleurs chaudes... Rencontres matinées de lianes, de racines, de viscères et de sang, au sens où bouillonne une vie nouvelle, une esthétique unique amenant le paysage, avec sa cohorte d’émotions, à affleurer la mappemonde.
Le pont invisible tendu par Mei-Tsen entre les toiles apparaît ainsi pas à pas dans nos imaginaires. Il gagne en amplitude, renoue avec le vivant, murmure l’indicible et l’émerveillement.